Elle a vingt deux ans, en paraît six de moins, au moins, ressemble à un garçon, ses cheveux étonnament courts et décoiffés desquels s'échappe une longue mèche.
Elle est trop propre pour être punk, trop sale pour être belle, elle est trop blanche pour être en forme, pas assez maigre pour être malade.
Dans la rigueur de son regard on sent toutes ses difficultés, à comprendre le monde, ça semble trop cliché, elle s'en fout, si vous saviez.
Son joint précieusement au chaud dans sa poche, elle attend le coin de la rue, l'immeuble d'un ami, le salon défraîchi et l'odeur de tabac.
Et ils feront l'amour comme des enfants hargneux, la rage dans le pantalon et le coeur vide et froid. Ils le feront d'abord parce que c'est évident, c'est une histoire d'hormones et pas de sentiments. Ils le feront lentement puis rageusement en choeur, de concert dans l'ivresse d'une harmonie trop sale.
Mais leur histoire est celle de tous ceux qui s'ignorent, leur histoire est banale et commune et typique. Leur histoire n'est pas belle. Leur histoire éternelle, elle sent l'ignominie de ceux qui ne veulent plus rien, qu'un peu de réconfort dans leurs sombres terreurs. D'un peu de baume au corps quand les brûlures au coeur les étouffent en silence.
Mina s'ébroue, comme un cheval mourrant, elle fume enfin le joint, le laisse se consumer sur la moquette usée. Et s'enfuit dans l'immense, énorme ville en feu.